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22 Mai 2020

L’interview de la semaine : entretien avec Alex Voyer

Cette semaine nous avons échangé avec Alexandre Voyer, nageur pirate, instructeur d’apnée et photographe reconnu. Et lorsqu’il concilie ses passions, c’est pour réaliser de superbes clichés au plus près des animaux marins et autres nageurs de tous poils. Rencontre.

Bonjour Alexandre, peux-tu te présenter et nous dire comment tu t’es entretenu physiquement pendant la période de confinement ?

J’ai 41 ans et j’ai toujours nagé de façon très intuitive. Je n’ai jamais réellement pris de cours de natation et je suis très très loin d’être un bon nageur. Mais j’ai passé beaucoup de temps dans l’eau pendant les vacances, avec mes parents qui aimaient nager et passer du temps à la plage. Je suis aujourd’hui, depuis une douzaine d’année, instructeur en apnée, mais mon activité principale est de réaliser des photographies en apnée. Je fais des clichés de sportifs ou d’animaux en mer. J’ai donc un lien particulier avec l’eau. J’aime même beaucoup l’eau et y passe beaucoup de temps. Quant au confinement j’ai la chance d’avoir été confiné dans ma maison dans le sud avec une piscine de 9 mètres. J’ai donc pu nager 2 fois par jour, 30 minutes, en alternant des séries de nage et d’apnée. Et cela m’a permis également d’apprendre à faire des culbutes (rires).

Tu nous dis être un nageur très moyen, mais peux-tu nous expliquer comment tu en es arrivé à devenir un nageur d’eau libre ?

Dans le cadre de mon diplôme d’instructeur d’apnée, on nous a demandé de nager avec des palmes. Je me donc suis inscrit dans un club de palmes à Paris et j’ai commencé à suivre des entraînements qui ressemblent beaucoup à ceux de la natation. Ils m’ont permis de comprendre les enjeux de la discipline et de participer à l’épreuve de 5 km de l’Open Swim Stars Harmonie Mutuelle Paris en 2017. Comme j’aime passer beaucoup de temps dans l’eau, les longues distances ne me font pas peur. Je suis particulièrement endurant et je prends mon temps. J’ai une vitesse moyenne de 3 km/h. Du premier 100 m au dernier je nage à la même vitesse. Je suis « passe partout » et cela est important pour mon travail. On me demande régulièrement de photographier de bons nageurs, beaucoup en eau libre, et il est important pour moi, comme pour eux, de savoir de quoi je parle. Je me dois de les comprendre et de pratiquer un minimum la discipline. Cela m’a permis de me rendre compte de l’investissement gigantesque que cela demande pour être un bon nageur. J’ai fait récemment des photos avec Alain Bernard. Et voir Alain évoluer avec autant de facilité et d’aisance dans l’eau, je trouve cela incroyable. D’une façon générale, je suis fasciné par le monde de la glisse aquatique.

Peux-tu nous parler de ton métier de photographe et de ton engagement en faveur de la préservation de l’environnement ? 

C’est grâce aux animaux et au côté naturaliste de mes photos que j’ai eu la chance d’être repéré. Je fais partie des premiers à avoir pris des photos de gros animaux en apnée, alors que d’ordinaire elles sont réalisées par des photographes munis de bouteilles. Cela permet d’être beaucoup plus proche et de ne pas les déranger avec le bruit des bouteilles. La démarche est beaucoup plus responsable envers les animaux. Pour autant je suis loin d’être moi-même très responsable. J’ai un bilan carbone déplorable avec mes nombreux voyages. Mais j’ai pris conscience de l’impact que nous avons sur l’environnement. Cela me dérange que 90% des déchets trouvés en mer proviennent de la terre et aient un impact négatif très important sur la vie marine. J’ai également été très surpris de découvrir une étude récente qui indiquait que l’on retrouvait en haute montagne des microparticules de plastique venant de l’évaporation d’eau de la mer. Cela m’inquiète au plus haut point et je m’efforce au quotidien d’être plus respectueux de notre environnement.

Tu es également instructeur d’apnée, quels conseils aurais-tu à donner à un nageur ou une personne qui souhaite découvrir l’apnée ?

L’apnée est un sport qui s’est énormément développé depuis une dizaine d’année. Il y a pratiquement un club d’apnée dans toutes les villes de France. Il y a beaucoup d’instructeurs, et très peu de contre-indications médicales empêchent de découvrir ce sport. Il faut se rapprocher des clubs existants et ne jamais se lancer seul dans cette discipline, et encore moins pratiquer seul, où que ce soit. Depuis la fin du confinement il y a eu 2 morts dès le premier jour. Un en Méditerranée et un en Atlantique. Nous avons tous des capacités d’apnée, et un stage de quelques heures suffit à progresser, que ce soit en mer ou piscine. Mais surtout, surtout, ne jamais pratiquer seul. On a encore vu récemment de grands champions mourir seuls, noyés dans leur piscine.

Dans le monde de l’eau libre, tu es connu également pour ton coté « pirate ». Tu vas régulièrement nager et faire des photos là où c’est interdit. Peux-tu nous dire comment tu en es arrivé là ?

C’est à la suite de la dernière traversée de Paris avec palmes en 2011 que tout a commencé. J’ai eu une révélation. J’ai trouvé Paris magnifique vue du fleuve. Suite à cela, avec des amis, nous sommes allés nager dans le Canal de l’Ourcq, sans qu’il n’y ait d’intention particulière de braver les interdits. Le but était de faire prendre conscience aux habitants du 19e arrondissement, où j’habite, qu’ils avaient à proximité de chez eux un magnifique terrain de jeu. Nous avons la chance dans Paris d’avoir la Seine, le Canal et des points d’eau qui permettent la pratique de l’eau libre. Ma plus grande satisfaction a été de voir évoluer la situation et la perception qu’ont les parisiens de leurs cours d’eau, avec notamment l’organisation de votre premier événement en 2015, puis l’implantation d’un bassin l’été dans le Bassin de la Villette, et maintenant des projets de sites de baignade dans la Seine avec l’organisation des JO en 2024.

Enfin pour terminer, tu as participé à 2 éditions de l’Open Swim Stars Harmonie Mutuelle Paris. Si tu avais quelques mots pour définir cet événement ce seraient lesquels ?

C’est difficile comme question pour moi parce que le Canal de l’Ourcq est mon terrain de jeu. Je cours régulièrement le long du parcours de 5 km de votre épreuve, du bassin de la Villette aux Magasins généraux à Pantin. Si je devais le définir je dirais que c’est l’événement de référence de la nage en eau libre en cœur de ville en France. C’est de là que tout est parti avec aujourd’hui votre développement des Open Swim Stars partout dans les grandes villes. C’est un moyen extraordinaire de pratiquer un sport de plein air au plus près de chez soi.

Site d’Alexandre Voyer : https://www.alexvoyer.com

Son compte instagram : https://www.instagram.com/alexvoyer_fisheye/